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Et voilà, de nouveau dans les boîtes, des boîtes toujours des boîtes, encore des boîtes. Vérifier que rien ne manque, insister pour que tout soit fait avec minutie. Lire la presse locale, sourire puis se demander comment cela se passera. Casquer gros pour que tout puisse prendre le chemin avec moi. Se taper un vol plus que matinal et puis un autre, angoisser que les paquets n’arrivent pas. A l’arrivée, vérifier que tout y est, que rien ne manque. S’enfermer dans une chambre d’hôtel et tout programmer dans ma petite tête, tout remettre en ordre, prendre soin de ne rien oublier pour les réunions. Sortir et aller au mercado du coin, ne pas oublier la liste, comparer les prix dans ma petite tête, c’est que tout coûte cher et se demander comment fait le citoyen pour survivre. Simple, il ne vient pas dans ce coin. Ce coin est une sorte de petit paradis même si ce n’est en rien comparable au choix d’ici. Mais faut bien que les expats et les diplomates se nourrissent. Identifier sur une carte le marché aux légumes le pus proche ou se dire non « laisse-donc faire le marché, mange à même le buffet de l’hôtel, tu te régaleras de bonnes tomates demain et les jours qui suivent »

Dormir, une fois le tout prêt. Au réveil, descendre le tout, faire semblant de ne pas remarquer les regards des touristes qui doivent se demander ce que je fais ici au beau milieu de ce beau monde. Ne pas oublier de laisser un bon pourboire. Sourire, sourire encore et encore. Prendre des notes, poser des questions, faire répéter quelquefois afin de s’assurer que j’ai bien compris, prendre des photos. Sourire, à en avoir les mâchoires démontées. Faire semblant de ne rien remarquer. Tout décanter, le soir venu, comparer les notes avec J. et A.

Un autre réveil, une autre rencontre. Sourire, encore et encore. Puis, aller visiter le monument dédié au plus célèbre des Argentins et Cubains. Faire le vide et oser formuler la question. Puis, rentrer, contempler la piscine et les touristes, discuter avec J. , A. et les autres. Relaxer, dormir, rêver à l’océan et au sable chaud. Rêver qu’un jour tout cela changera. Et ainsi de suite..

Tu iras dans un bar et tu fermeras les yeux. Ici, tu refuseras de déconstruire, parce qu’en fait tout y est clair et que la vie n’est pas de tout repos. T’écouteras le monde autour de toi, tu contempleras encore une fois. Tu éviteras de t’emporter quand quelqu’un se mettra à y aller de son analyse du système. T’auras envie de dire « Forcément facile d’en parler quand vous êtes pour quelques jours. », mais tu te retiendras. Tu chercheras à contacter ton ami qui connais tous les recoins de la ville et les derniers potins. Tu iras visiter tes amis, prendras en photo les enfants et ne donneras aucune nouvelle parce que tu n’en as aucune à donner. Parce que la vie est ainsi faite et que nous oublions de donner signe de vie.  Tu enfouiras encore et encore images et sensations.

Tu te surprendras encore une fois à être ébahie par le système D. Tu sortiras et chercheras du regard le vieil homme face à la mer. Tu préfères ne pas trop imaginer la scène sans lui. Tu te contentes de répéter dans ta petite tête “siácara!” comme pour exorciser les pensées négatives qui s’amoncellent.

« Are you Cuban »? Sur ce, tu répondras que c’est une longue histoire et que s’ils ont le temps tu leur raconteras tout cela autour d’un bon Moros y Cristianos et tu iras rejoindre les amoureux du Malecon.