Il pleut sur la ville, de loin nous parvient le fracas des vagues sur les murailles du Malecon. Juan et moi partageons une mangue et marchons lentement. Qu’importe si nous n’avons pas de parapluie, qu’importe si nous n’avons pas suivi les conseils de tout le monde, La Havane s’orne de mille et un diamants sous l’effet de la pluie rédemptrice. Nous nous réfugions sous un ceiba, puis nous continuons à marcher. L’Avenida de Los Presidentes semble ressembler à une vague toile impressionniste. Une femme vient déposer des offrandes au pied d’un ceiba. Juan espère que ses prières seront comblées. Il se retourne vers moi et prend son air le plus sérieux pour me dire el fin no justifica los medios
La faim qui te fais basculer. La honte de ne me recevoir. Toi et tes slogans placardés partout . Eux qui sont tombés pour un idéal et la culpabilité que nous devons porter pour respirer. Au bout du tunnel, au fond de cette gare, la faim est un concept abstrait, lointain , mais elle est présente dans chacune de mes rencontres. Elle me bouffe comme tu me bouffes. Et je me demande si j’ai encore envie de jouer même si je t’aime. La musique arrive et j’ai peur de ne plus te retrouver toi mon île, celle des privations qui me font espérer des jours meilleurs, mon île de la disette, mon île des embargos. Siácara! Je jette tous les mauvais sorts à la mer. Siácara, je me dévêts pour vous implorer vous, toutes les déités, de nous foutre la paix. Siácara! Je me rends compte ce soir combien tu me manques et je dois patienter. Je dois me taire pour pouvoir te défendre dans quelques jours. Dis, me donneras-tu la force du silence?
Chroniques havanaises IV
05 samedi Sep 2009
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ce récit me rappelle une chanson d’Ibrahim Ferrer.
Merci Loula
C’est moi qui te remercie de passer sous la tente et d’y laisser ton empreinte.