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Hidden Garden II Asma 036
Mes plus plates excuses, passant et passante d’avoir négligé cet espace. J’ai pris du temps pour remettre de l’ordre dans mes idées et autant pour foutre le capharnaüm dans ma p’tite tête où continuent à jouer aux bolides sensations fortes et prises de décisions. J’ai fait des rencontres sublimes, ai raté tant de rendez-vous, me suis prise la tête avec moi-même. J’ai même osé, le dernier jour, montrer le doigt à un automobiliste; assisté à quelques ébauches de bagarres et j’avoue avoir eu peur par moments; vu des gens prendre la voie publique pour des toilettes; constaté le déglinguement des infrastructures; parlé à des policiers super gentils et pris en photo tous les canons de la Cité portugaise (là rien à dire les autorités marocaines sont d’une nullité inégalée quand il faut préserver le patrimoine mondial). J’ai aussi réalisé qu’il fallait à la zmagria que je suis bien de la patience pour m’adapter à une dynamique qui n’était plus mienne, à un rythme de vie que je ne comprenais plus et faut avouer que nous devons changer de lunettes quand nous posons le pied dans nos pays d’origine. J’ai détesté cette façon rustre qu’ont certains et certaines de s’adresser aux gardiens de stationnement, aux vendeurs, aux concierges. J’ai abhorré ce snobisme où certains préfèrent parler français plutôt que darija pour se pomper l’égo ou se montrer supérieur à leurs interlocuteurs. Je fus surtout surprise de voir le monde se la jouer. Car, après tout et dans la plupart des cas nous sommes tous né(e)s de la même façon, non? Je ne suis toujours pas allée en Andalousie et me demande si j’y parviendrais un jour. Je ne suis pas sortie, non pas souvent.
J’ai paniqué lorsque je n’ai pas vu ma fille sortir du Terminal 3 bouclé par peur de bousculade. En fait, elle a été retenue pendant une heure car n’avait pas sur elle l’adresse où elle séjournerait et ai été soulagée quand le gendarme a finalement eu pitié de moi et m’a laissée passer pour aller m’enquérir de son sort et la retrouver en train de se faire taquiner par un policier qui lui proposait de la garder quelques heures de plus afin qu’elle apprenne plus de darija. Mais, revenons au Terminal 3 de l’aéroport Mohamed V, Monsieur Benhima, quand donc les horaires d’arrivée seront-ils sur écran? Ce n’est quand même pas la fin du monde d’installer un écran?
J’ai revu Oualidia et la famiglia. J’ai déambulé quelques heures à Casablanca. J’ai élu domicile à Haouzia, suis allée à Moulay Abdellah Amghar, ai rencontré le beau Bouchaïb cultivateur bio du Jorf et lui ai promis d’essayer de lui trouver une copine (avis aux intéressées, il a les yeux d’un bleu azur à faire pâlir Brad Pitt, aime rire et travaille la terre, ça relève du fondamental). Je me suis petit à petit habituée au rythme de vie. J’ai adoré chaque fois que je suis allée acheter du pain de seigle chez mon épicier préféré, un soixante-huitard comme on n’en fait plus, chaque signe de la main de Aziz, le laveur d’autos; chaque mot échangé avec le boucher du marché central, chaque conversation avec l’autre Aziz, marchand de légumes qui se faisait un plaisir de commander basilic à chaque fois que j’en voulais. J’ai ri avec mon cousin et mon frère; revu quelques uns de mes amis; été émue aux larmes de revoir les petits cousins et contasté avec bonheur que ma fille partageait bien des affinités avec ces derniers; imaginé être ailleurs quand les cousines voulaient m’embarquer dans une conversation typiquement tribale; regretté de ne pas savoir conduire une manuelle même si ma fille ne donnait pas cher de ma peau et qu’elle me l’a encore rappelé hier; pleuré par moments et ai été attendrie la plupart du temps.
Maintenant que je suis de retour, chaque moment est un bijou à protéger dans le plus précieux écrin.
Mwah