Il est parti un beau matin. Pleuvait-il, neigeait-il? Elle ne s’en souvient plus très bien. Il est parti comme elle a fini par plonger. Chaque relation nous enrichit se disait-elle il y a longtemps. Ils ont ri, ils se sont aimés, ils se sont perdus pour mieux se retrouver. Ils ont refait le monde selon leurs idéaux pour se rendre compte qu’ils n’étaient maîtres de rien et encore moins de leurs désirs les plus fous. Quand ont-ils cessé de converser? Toujours est-il qu’aujourd’hui il rentre sans rentrer, elle part sans jamais revenir. Dans cette bulle ils essaient de maintenir les apparences. Il l’ignore. Elle tente de rétablir le dialogue. Il répond de manière évasive sans la regarder. Elle trouve son regard blessant. Il a le regard hautain. Du coup, elle se sent toute petite. Elle essaie de comprendre me dit-elle. J’ai envie de lui dire qu’il n’y a rien à comprendre. Que ce pauvre mec est un taré, mais je n’ose pas. Nous sommes arrivées ici en même temps. Elle était vivante, toujours souriante. Sa maison ressemblait à un carrefour. J’étais toujours certaine d’y trouver des amies. Sa maison était une sorte de halte convenue pour nous les expatriées. Il y a des années, il lui avait dit qu’elle n’était plus désirable. Elle a commencé à faire du sport. Il s’absentait et en revenant se disait fatigué, lessivé. De ses tourments elle n’en a jamais glissé mot à personne. Elle a continué à être la jeune femme pleine de vitalité et au sourire ensoleillé. Puis, elle a glissé lentement. Elle se faisait rare, s’est impliquée dans des activités qui lui prenaient tout son temps. C’était sa façon à elle de compenser et surtout de ne pas penser au gouffre qui continuait de s’approfondir entre eux. La semaine dernière, il a recommencé. Il l’atteint lorsqu’elle est la plus vulnérable. Au lieu de l’ignorer, elle veut comprendre, se retrouve face à un mur. Du coup, elle passe ses journées à pleurer. Le fait qu’elle n’ait personne dans le coin accentue sa détresse. Elle me dit que si elle avait été ailleurs, elle serait sortie, elle aurait été mieux préparée à discuter. Mais qu’ici, elle est prisonnière des grands espaces, de l’isolement. Il y a des jours où je maudis Khmiss Batata car sous ce décor bucolique se cachent parfois les plus tristes des réclusions. Faut que je m’occupe d’elle non par pitié ou par amitié, mais bien parce que je sais combien ce genre d’isolement peut être destructeur.
29 mardi Nov 2005
Posted Uncategorized
in
Re loula,C’est plus que destructeur, c’est un vide dévastateur mais très FORMATEUR.C’est dans le vide qu’on peut se découvrir davantage et construire. Thanks for u re ability to explain feeling by words.Bishara… Bien formée
Plus désirable…Y a des mots qu’on alche quand meme trop facilement…On se sent impuissant face à tant de méchanceté, de ne pas etre capable de renvoyer la balle…Parler et pleurer, ce n’est que comme ça qu’on évacue cette colère, ce chagrin, cette deception…Toute la difficulté est de trouver la bonne épaule.Rares sont ceux qui veulent partager avec toi cet état.Je te souhaite d’etre une bonne épaule…Vraiment…Je crois que je sais ce que ça veut.
Merci les filles.Mwah
Salut loulaIl y a quelques jours, j’ai lu un billet de larbi qui racontait la détresse racontée par un ami-copain-proche-lointain. On n’a rien su de très précis sur lui, mais j’ai été très touché. Aujourd’hui, tu nous racontes une autre détresse sûrement très différente, mais pourtant, j’ai l’impression qu’elle est très similaire à celle racontée par larbi. Le principal lien semble être… l’éloignement. L’ailleurs. L’étranger. Il m’a toujours semblé, à priori, sans preuve « scientifique », que la détresse de « l’extérieur » est autrement plus douloureuse. En tout cas, merci de donner l’exemple en partageant la douleur des autres.ML…ici et pas ailleursPS : bishara, qu’est ce tu fais là ? Et moi alors ? Qu’est ce que je t’ai fait ? Pourquoi tu ne viens plus chez moi ?