« Le terrorisme est un crime qu’on ne peut ni excuser ni laisser se développer. Après tout, Gandhi a prouvé qu’on pouvait lutter pour son peuple et vaincre sans cesser un seul jour de rester estimable. Quelle que soit la cause que l’on défend, elle restera toujours déshonorée par le massacre aveugle d’une foule innocente où le tueur sait d’avance qu’il atteindra la femme et l’enfant. »
Albert Camus
Il y a longtemps, nous racontait un des Anciens, la peur s’installa petit à petit dans nos rues, nos réunions, nos sorties, nos foyers et tout simplement nos coeurs. Le Consultant Suprême ayant étouffé toute opinion contraire se mit à parler comme le représentant de la Connaissance Suprême. Cela dura un moment, puis des écervelés las de ne pas voir leur heure de gloire arriver se mirent à prophétiser, chacun de leur bord. Ils travaillèrent des années durant en silence et se défendant d’être simplement des adeptes de la Connaissance Suprême. Puis, le terrain libre, ils commencèrent à jeter l’anathème sur quiconque ne cadrait pas avec leur vision de la vie qu’ils projetaient d’établir au delà du Dôme. Car, disaient-ils, le Message ne pouvait avoir de frontières terrestres.
Cela avait commencé de manière simple et directe, une insulte pour intimider ceux qui refusaient de baisser la tête. On avait commencé par les insulter: Impie, ce terme condamnait la victime, la dépossédait de son statut de membre du groupe, l’avilissait, la déshumanisait. Un des Consultants plus au sud avait même insisté pour que la non conformité aux principes de la Connaissance Suprême soit inscrite dans la Constitution de son fief on pouvait lire à l’article 306 : « Chaque citoyen coupable de non conforminté et d’absence de foi en Nous sera invité à se repentir sur une période de 36 heures. S’il ne se repent pas, il sera condamné à mort et sa propriété sera confisquée par la Trésorerie du Dôme » Et pour mieux apeurer le monde l’article continuait avec ceci: « Tout citoyen majeur qui refuse de croire tout en niant cette responsabilité sera invité à s’en acquitter en professant publiquement sa foi en la Connaissance Suprême véhiculée par nul autre que le Consultant. Son corps, après constat de décès, sera jeté en dehors du cercle sacré ».
Puis, venaient les intimidations physiques. Les milices des prophètes firent leur apparition dans les rues. Lâches, leurs membres ne se déplaçaient jamais seuls, ils devaient être au moins 10 afin d’imposer la crainte. Aussi perfides que les inspecteurs des Hauts commissariats à la santé. Ils gifflaient les femmes, les traitaient de putains, leur assenaient des coups de fouet tout en poursuivant leur chemin. Ils avaient comme les inspecteurs développé un plaisir sadique à rabaisser et terroriser les habitants. Ils avaient réussi à instrumentaliser la torture en jetant leurs « ennemis » au bûcher jurant que l’Univers était menacé par les libres penseurs, les démocrates, les homosexuels, les femmes, les enfants d’union libre, les poètes. La démocratie était l’ultime ennemi. Car cette dernière niait la préséance de la Connaissance Suprême. C’était un concept abominable dont il fallait se débarasser au plus vite.
L’Ancien fit une pause, soupira et nous dit avec un air triste: Voilà ce que nous vous léguons désormais des Dômes démunis de tout bon sens. Des champs infertiles, des lits de fleuve asséchés et des hordes de vampires prêts à tout pour mieux boire votre sève. Nour lui prit et la main: Continue Ancien, continue.
Pas ce soir, trop de sang, trop de privations, trop de mensonges viennent hanter le vieux que je suis devenu. Demain, mais ne vous aventurez pas loin car ils rôdent.
Qui?
Eux, les ennemis, ils rôdent…
Il se leva et monta les marches d’un pas incertain. La nuit s’installait lentement et les hauts parleurs indiquaient d’une voix toujours aussi monocorde, mais avec un fond de fanfare militaire, qu’il fallait encore faire attention et se méfier des étrangers.
Chacun de nous se dit à demain. Plus rien ne semblait certain aux yeux des Anciens alors que nous n’avions pour seul soleil l’insouciance de l’enfance.
sublime Loula ça m’a fait pensé à »la chutte de l’imam » de Saadaoui que j’avais adoré…Encore une fois tu vois juste et tu vise là où il faut, un vrai plaisir de te lireet un mwaaaah pour ce beau billet
Suite au conseil de mon amie kenza, je viens à la découverte de votre espace de réflexion. Il est de plus en plus rare de faire une halte agréable et instructive dans la blogosphère. Soyez en remercié.A propos de Camus, son essai l’homme révolté est une clef importante selon moi pour comprendre certaines attitudes de nos contemporains. Cordialement.
J’adore cet esprit camusien, d’ailleurs qui n’est pas loin de nos terres et qui a parlé un jour des ruines de Tipasa et du plaisir de bain de foule. comme le dirait lui même, il y a un temps pour vivre, on écrirait ensuite.L’histoire a toujours donné raison à ceux qui ont défendu la Vie.Bravo pour ton style, et bon courage.
Comment expliquer l’inexplicable ? Avec ta génie.
MAGISTRAL
Je comprends pas là? tu fais allusion à qui et quoi? si tu dénonce les religions en général et l’islam en particulier, c’est un autre débat, mais bizzarement moi je projete ce que t’as ecris sur nos régimes et nos politiques, pas sur la religion.Et j’aimerais par contre qu’on m’explique ce que vous tous avez compris de ce billet, pas spécialement l’auteur, par exemple celle qui dis « Magistral »!!! qu’es ce t’as compris?
Bonjour la compagnie,Kenza, je n’ai pas lu le bouquin en question, donc je l’ajoute à la liste des livres que je devrais lire.Mohamed et Mounir, soyez les bienvenus sous la tente.Marsha et une marocaine, trop généreux de votre part.Marocain, nous ne sommes pas dans un cours d’approche socio-psycho-lingusitique du texte, donc libre à chacun et chacune de l’interpréter comme bon lui semble.Je vous souhaite à toutes et à tous une excellente journée
La peur prend le dessus. Casablanca n’est plus aussi animée comme d’habitude. Les gens ne sortent plus la nuit comme avant. Les chevaux du Dôme trottent…Merci Loula de nous faire réfléchir.
ça c’est fort, tu laisses à chacun et chacune l’interpréter comme ils leur semble, sauf que je vois pas d’interprétation, j’ai l’impression que je suis le seul à ne pas comprendre ce que tu veux passer comme message, enfin j’ai une idée :), mais ton approche me parait bizzare, sauf si vous communiquez tous mystérieusement,mmm!!! vous serez pas un club d’intellos par hasard?!!!!!
Bonjour,Nadia, j’imagine qu’un climat de paranoia est en train de s’installer.Marocain, pourquoi faut-il que cela ait un sens et pourquoi faut-il que le message soit clair? Chacun son approche…Bonne journée
@ marocain,Lis d’abord son billet « au delà du dome I » et par la suite on en reparlera.Et rassure toi on est pas un club d’intellos ni une secte on est juste une bande de personnes qui s’apprécient et se respectent mutuellement.
Tout simplement superbe.Le temps des anciens a fait place à une ère encore plus trouble, décontenacée et inconsistante.Les anciens ont usé de la main de fer pour imposer leur vision, la seule et unique, plus tard, les hérétiques ont commencé par voir au delà de la colline et au delà des mers. Alors qu’ils découvraient de nouvelles choses, ils oublièrent un danger venant d’autres terres, portant cette « ultime connaissance » qui vint ensanglanter leur douce contrée.Aujourd’hui, il est temps pour tous ces enfants de redécouvrir leurs rêves.
Sois le bienvenu, Fays. Tes propos résument merveilleusement bien ce qui voulait véhiculer le texte.
@une marocaine,J’ai pas lu, c’est vrai,le tome I du billet, mais t’es qui d’abord pour parler au nom de tous ?!!!! et qui a parlé de secte!!!!
Après lire les paroles de Camus au début de ce billet, je te remercie parce qu’elles précisent mieux que toutes autres que j’ai vu pourquoi le terrorisme ne mérite ni excuse ni pitié.Pour le texte, je te remercie encore pour ce moment de réflexion, ce qui nous permet à voir l’importance de combattre la peur alors qu’il nous reste encore de la lumière, au lieu d’attendre que le jeu soit déjà perdu.@ marocain, ne te fâches pas, on a dit que l’interprétation du texte est ouverte, alors la tienne est aussi juste que tout autre.